[ Sorry c'est court ... ]


Mais bien sûr Garreth, c'était une pure idée brillante que tu as eu, une pure ! Tu as bien flâné sur la douche, c'est sûr que c'est cool de chanter sous la douche exprès pour faire chier son colocataire mais c'est sur aussi que c'est une pure perte de temps. Mais ça va, le temps, ça me connais, je suis toujours à l'heure même quand il ne me reste plus qu'une seule seconde pour traverser la ville. Et comme c'est intelligent de prendre le métro, il faut dire je ne savais même pas qu'il y en avait un ici alors comme ça. Mes cours commençaient à onze heures quinze, cette saleté de Mme Jacquet était absente, pour une fois. Et comme j'adore arriver en avance pour être sur d'avoir la meilleure place dans l'amphithéâtre et bien maintenant je me retrouve au beau milieu d'une foule de personnes très très pressées. J'ai pris mon ticket, j'étais très mou, très lent, histoire de bien embêter tout le monde derrière moi. J'ai suivi une jeune femme qui semblait connaître le chemin jusqu'au métro, sauf que j'aurai dû faire plus vite parce qu'à cause d'elle j'ai manqué mon arrêt. Pas grave, je n'ai plus qu'à attendre encore un peu. Par contre, elle, elle semblait furieuse d'avoir manqué son arrêt et devait surement être en retard. Je levai les yeux au ciel, souriant à pleines dents, j'allais enfin me rendre utile aujourd'hui et en plus cette petite brune me semblait bien sympathique. Je la suivis dans le métro et m'assis en face d'elle. Je l'observai d'abord, brune aux yeux bruns, banale. Elle était vêtue de noir et était plutôt mignonne et surtout très pressée. Je me penchai en avant, vers elle, les bras sur les cuisses et je regardais autour de moi avant de murmurer à la belle inconnue.

« Ne seriez-vous pas en retard ? »

J'avais l'habitude que l'on me regarde ainsi, mais là ça sortait de l'ordinaire, elle semblait fascinée par mes yeux ou quelque chose dans le genre. Tellement, qu'il y eu un certain temps qui s'écoula entre ma question et sa réponse très vague qui était un petit oui. J'avais déjà tout un plan en tête et sourie de ma bêtise, quel cancre je suis, retarder une jeune femme mais quelle honte voyons. Soudainement elle recula son buste et semblait paniquée, jurant par-ci et par là comme une adolescente qui avait manqué son rendez-vous au cinéma. Elle était abattue et venait certainement de manquer son arrêt qui l'emmenait dieu seul sait où. Elle encra son regard dans le mien, furieuse. J'eus envie de reculer mais je m'approchai encore plus pour détecter une odeur. Bingo! Cette femme n'était pas humaine et en plus elle était de mon clan. J'allai pouvoir mettre en marche mon plan, qu'il soit diabolique ou non. Par contre elle était toujours aussi rouge que tout à l'heure, quand je lui avais adressé la parole. Peut-être qu'elle avait trop chaud, bien que cette hypothèse me semble très fausse. Elle me demanda où j'allais et j'eus envie de pouffer de rire. Où je vais? Jamais personne ne me l'avait demandé, tout le monde sait que je vais là où ça me chante, quand je veux et comme je veux. Seulement, cette étrangère n'était pas censée le savoir. Je décidai de lui répondre en murmurant doucement.

« Là où vous allez. Suivez-moi ... »

Je me levai de mon siège, déjà satisfait de ce que j'allai faire. Je comprends dorénavant les super-héros comme Superman ou Spiderman, la satisfaction que l'on a lorsque l'on aide une jolie jeune fille totalement désespérée. Je m'approchai de la porte du métro, poussant un peu tout le monde sur mon passage. Je me cramponai solidement à la barre, sachant très bien ce qui allait arriver si je me dépensai de trop. Pour établir le contact, non pas avec les aliens mais avec le temps, je dus prendre la main de l'inconnue et la poser fermement sur la barre sans la lâcher. Il ne fallait pas qu'elle lâche, encore moins qu'elle tombe sinon des dégâts pouvaient être irréversibles, je sais de quoi je parle. Je jetai un vif coup d'oeil à l'heure et posa ma tête sur la barre, fermant mes yeux et serrant les dents. Première étape, arrêter le temps tout en me maintenant moi et cette femme dans le présent. Le métro s'arrêta brusquement, je manquai de tomber. Et bien sûr personne ne le remarqua, tout le monde était à l'arrêt, conservant le mouvement qu'ils étaient en train de faire. Seconde étape, remonter le temps. Je ne vais pas vous mentir, je n'ai jamais remonté le temps - enfin je ne préfère pas mentionner mon premier essai qui a été un échec total. Mais cette fois-ci l'effet était satisfaisant. C'était comme lorsque l'on rembobinait un film, les gens faisaient leurs gestes rapidement et à l'envers. L'heure numérique tournait tellement vite qu'elle aurait pu exploser. Il était à présent dix heures quinze et les portes du métro s'ouvrirent à l'arrêt que la jeune femme devait prendre. Je la guidais dehors rapidement, ne supportant pas le métro et ayant besoin d'un peu d'air frais.

« Dix heures quinze, vous êtes toujours en retard ? »

Demandai-je en souriant, trop fier de moi.

[ Pardon pour le retard .. :$ ]

Un fauve lâché dans une gare, voilà ce que j'étais, seulement je ne le montrai pas trop, j'essayai de me canaliser du mieux que je pouvais. La jeune femme semblait comblée et je voyais qu'elle aussi se retenait de quelque chose, mais certainement pas de l'envie de courir sur plusieurs kilomètres comme j'en avais envie. Oui, j'ai des envies étranges, j'ai faillit être classé dans la catégorie "hyperactif", d'ailleurs je suis persuadé que j'en suis un. Mais je m'éloigne quelque peu du sujet principal qui est la réponse de l'inconnue. Elle me remercia en souriant pour montrer toutes ses dents et me demanda si je voulais bien prendre un café avec elle, histoire de parler. Je n'aurais peut-être pas accepté si je n'avais pas sentie cette odeur féline en elle. Je lui adressai un grand sourire mais marquais un temps d'arrêt, je n'avais pas envie de paraître impolis en lui répondant par un ouais ou je ne se sais quoi d'autre encore. Finalement je lui répondis rapidement en avançant un tout petit vers elle pour commencer la marche vers la sortie de la gare.

- Volontier, répondis-je avec un sourire tellement grand que si je le conservai j'aurai une crampe aux zygomatiques.

Je suivais l'inconnue, j'avais totalement oublié de lui demander comment elle s'appelait. Mais finalement, savoir son prénom n'était pas essentiel et pour l'instant pas vraiment nécessaire. Et puis je pense que lorsque nous siroterons notre jus de chaussette nous nous présenterons, enfin dans la logique incroyable des choses. Je m'imaginais déjà assis sur ma chaise, les muscles détendus, à parler de mes expériences farfelus de l'hôpital, grand bavard comme je suis. Sauf que je m'imaginais trop, je suivais la jeune femme dans la rue et mon évasion me coûta un poteau dans les pieds, vous savez, les horribles petits poteaux inutiles au bord du trottoir. J'ai bien failli m'étaler sur la route mais je me suis rattrapé de justesse, souriant et surtout honteux.